Face à la multiplication des études scientifiques concluantes, le ministère des Solidarités et de la Santé a lancé une grande expérimentation pour évaluer le potentiel thérapeutique du cannabidiol (CBD), une substance extraite de la plante Cannabis L. Sativa.
Le CBD, l’alternative « non psychotrope » au cannabis médical
Le potentiel thérapeutique du chanvre a fait l’objet de plusieurs études scientifiques concluantes depuis le milieu du 20e siècle. Soulagement de la douleur et du stress, traitement des maladies dégénératives, maîtrise des symptômes digestifs de la maladie de Crohn, traitement des troubles de l’humeur et de l’appétit… le cannabis thérapeutique a montré des résultats cliniques prometteurs. C’est d’ailleurs ce qui a poussé plus de deux tiers des Etats américains à le légaliser dans les établissements de santé. Seulement voilà : le potentiel thérapeutique de cette substance n’a jamais été véritablement exploité pour trois raisons :
- Son effet psychotrope et le risque d’addiction élevé ;
- Les craintes autour de l’approvisionnement et des dérives potentielles (trafic notamment) ;
- Des considérations éthiques.
Le cannabidiol (CBD), substance issue du chanvre, conserve certaines propriétés relaxantes, antalgiques et anti-inflammatoires du cannabis sans induire d’effet « planant ». Comme l’explique le Comité Scientifique de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), le CBD « ne présente pas de risque d’abus et n’est pas nocif pour la santé ». C’est sans doute ce qui a poussé la communauté scientifique à densifier les travaux de recherche pour évaluer le potentiel thérapeutique du CBD.
Les indications de l’expérimentation définies par l’ANSM
C’est donc dans ce contexte que le ministère des Solidarités et de la Santé a lancé une vaste expérimentation pour évaluer le potentiel thérapeutique de deux molécules issues de la plante Cannabis L. Sativa, également appelée Chanvre Cultivé : le cannabidiol (non psychotrope) et le THC (psychotrope). L’Agence nationale de la sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a défini les indications suivantes pour cette expérimentation lancée le 21 mars 2021 et qui devrait durer deux ans :
- Les douleurs associées à certaines pathologies neurologiques, notamment les formes d’épilepsies dites « réfractaires » ou « pharmaco-résistantes » et certains cancers ;
- Certains symptômes rebelles en oncologie ;
- La spasticité douloureuse de la sclérose en plaques ;
- Dans une configuration de soins palliatifs.
Trois codes CIP spécifiques ont été mis en place pour les médicaments inclus dans l’expérimentation. Il s’agit des fleurs séchées, des huiles orales et des comprimés sublinguaux de cannabis médical. L’Assurance Maladie assure une prise en charge à 100 % pour les patients bénéficiant d’une prescription médicale.
Olivier Véran, ex-ministre de la Santé, a assisté à la première prescription médicale du CBD au profit d’un patient souffrant d’épilepsie pharmaco-résistante au CHU de Clermont-Ferrand. Au total, plus de 3 000 patients devraient prendre part à cet essai clinique qui a d’ailleurs atteint son 1 000e patient dès novembre 2021.
Le CBD « récréatif » fait des émules dans l’Hexagone
En deux ans, le nombre de boutiques spécialisées dans les produits à base de cannabidiol a été multiplié par cinq, passant de 400 en 2020 à plus de 2 500 en 2022. A l’origine de cette explosion, un engouement sans précédent des Français. A en croire les chiffres de l’interprofession Interchanvre relayés par le très sérieux média LSA Conso, la France ne compterait pas moins de 7 millions de consommateurs qui s’approvisionnent dans les magasins spécialisés, en grande surface (Monoprix et Carrefour proposent des « espaces CBD » depuis le début de l’année 2022) ou qui commandent du CBD en ligne auprès des nombreux sites internet qui ont vu le jour depuis la légalisation de la molécule.
Malgré ces signaux au vert, les professionnels cette filière qui génère 300 millions d’euros chaque année restent prudents. En effet, un arrêté ministériel paru le 31 décembre 2021 avait tout simplement interdit la commercialisation des fleurs et feuilles de CBD brut, avant d’être temporairement suspendu par le Conseil d’Etat qui devrait rendre une décision définitive d’ici la fin de l’année.